Magazine : Le Nouvel Observateur- 05 Mai 2005

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LE NOUVEL OBSERVATEUR

« Tu m'as faite mieux que ma mère ! »
MON LIFTING AU SOLEIL
Liposuccion, lifting, implants capillaires... De 30 à 50% Mois cher qu'en France, billet d'avion et séjour en hôtel de luxe compris !

En quelques mois, la Tunisie est devenue le nouvel eldorado de la chirurgie esthétique.

Reportage de notre envoyée spéciale en Tunisie:

...Liposuccions, lifting, augmentation mammaire, abdominoplastie, implants capillaires, la Tunisie casse les prix. Tout de 30 à 50 % moins cher qu'en France avec séjour en hôtel de luxe. All inclusive ! A ce prix-la, on vient seule, entre copines, en famille. Les enfants jouent dans la piscine, papa s'offre un ventre plat, maman de nouveaux lolos....

Six jours après son lifting, Valerie, 40 ans, fonctionnaire à Arras, profite de la piscine de l'hôtel avec sec enfants.

Denise, huit jours après son lifting. A Tunis , elle a été « ébahie par la gentillesse et la compétence des gens ». Elle veut y envoyer toutes ses copines.

...Tout se passe via Internet, questionnaire rapide : « Avez- vous de problèmes de santé ? Est- vous dépressive ? » On envoie les photos des visages, des seins et des cuisses redessiner... Diagnostique quasi immédiat, liste des examens médicaux à faire, quelques échanges par téléphone ou par mail et les voila dans l'avion. A les entendre, en apparence si confiants, on dirait qu'elles partent en thalasso. « Moi, ça m'a pris dix jours en tout »,mitraille Nadia, serveuse en banlieue parisienne. Comme beaucoup,elle voulait « faire vite, surtout ne pas trop réfléchir »...

Avec les tunisiens, au mois c'est simple, pas de « prise de tête », ni de médecins tatillons qui palpent vos motivations. La trentaine, infirmière, Marie a consulté à l'hôpital de Nice il y a deux ans pour une nouvelle poitrine. On ne l'a jamais rappelée. « Au moins ici, on n'est pas , personnel aux petits soins, la promesse d'une convalescence à l'ombre d'un café de Sidi Bou-Said. Et puis ici, souvent, on ne compte pas. « Tant qu'à subir une anesthésie générale, réfléchissez, proposent certain voyagistes, une seconde opération est envisageables dans la foulée. » De nouveaux seins pour 1000 euros de plus... Nadia a l'origine inscrite pour une lipo des cuisses, à cassé la tirelire. Patricia, la Lyonnaise qui n'avait jamais pris l'avion, a aussi craqué . Lifting du visage, des seins, deux jours à la clinique, huit jours d'hôtel pour elle et sa fille. : 5 100 euro ! Elle ignore combien elle aurait payé en France, elle sait juste que ce n'est « pas cher » ;

« Carrément concurrentiel », selon Roland, petit bonhomme au look de comptable rencontré dans un de ces palaces de béton ou les voyagistes loges leurs patients. 75 ans, une retraite confortable à Montpellier. Lui n'est pas accro a la chirurgie, contrairement à sa femme, Denise, jean moulant et tignasse caramel, qui déambule sur de petits talons orange. Elle est « ravie ». A Montpellier, les copines alignent 4 500 euros pour un simple lifting. Ici, pour le même prix, elle a eu le lifting total avec injection de graisse et une petite intervention pour retendre les bras. Elle a aussi eu « le » chirurgien du pays, celui qui toutes les riches Tunisoises s'arrachent. « Regardez un peu le travail ». De petits fils suturent ses paupières, les pommettes sont encore gonflées... »Bientôt, on va croire que c'est ma fille », soupire Roland. La pin-up remet ses lunettes fumées : « Faut pas croire, c'est n'est pas une promenade de santé ». « C'est ce qu'elle a confié ce matin à la toute nouvelle, Patricia, la patronne du bar- tabac du Lyon. Les deux femmes se son croisées à la clinique,.Elles se reverrons sûrement au buffet ce soir...

Au Club Med de la chirurgie, il faut s'entraider, parce que ce n'est pas toujours facile.

La plage et la piscine sont désertes. Les clients mangent du bout de doits, certaines marchent comme Robocop, d'autres paraissent échappées d'un match de boxe. Au début, on se regarde un peu de travers, puis on rigole.

LE BOOM DU TOURISME MEDICAL

« Qu'ils profitent, les dentistes français, ça ne va pas durer... » Daniel, retraité en Corse, revient de Bucarest. Il se fait poser deux couronnes pour 160 euro, un deuxième du prix demandé en France. François, lui, se fait soigner dans une luxueuse clinique de Budapest.

: »Même mon dentiste de famille est épaté. » ...Au royaume de la Sécu, le tourisme médical décolle doucement, surtout sur les soins non remboursés : chirurgie esthétique, soins dentaires. Mais à l'étranger, il explose. Des cars entiers de Suisse, d'Allemands et d'Autrichiens vont soigner leur dentition le long de la frontière austro-hongroise... Des agences proposent des voyages en car tout compris au départ de Vienne et de Zurich.

« Un sourire hollywoodien pour trois fois rien », ce sont les mêmes slogans à Cuba, Manille, Gdansk ou Rio. Tout bientôt : ce sera la grande promo sur les opérations de la myopie ou les implants mammaires. Avec la mondialisation, la santé est devenu un bien comme un autre. « Quand en peut acheter un tee-shirt made in Thaïlande dix fois moins cher, personne ne se prive. Pourquoi tenir un raisonnement différent quand il s'agit de la médecine ? ». C'est un Américain qui parle, un de ces milliers d'Américains qui partent se faire opérer à Bangkok ou à New Delhi. La presse anglo-saxonne regorge de ces récits de patients du bout du monde soignés à merveille, sans délai, dans des cliniques ultramodernes d'Asie. L'an dernier,un million d'étrangers sont allés se faire soigner en Thaïlande, 150 000 ont choisi l'Inde ou Singapour. L'Afrique du Sud, elle mise sur le tourisme haut de gamme : opérations de la hanche avec convalescence dans un spa ; package »sourire de star », avec palace et tout en hélico ; combiné « bébé safari » pour les candidats à la procréation assistée.

Certains médecins anglais et irlandais envoient désormais leur patientes se faire inséminer aux Barbades, pour « réduire au minimum de stresse ». Coût : 12 000 euros pour quatorze jours, pas beaucoup plus cher finalement que les 10 000 euros demandes à Londres.

S .des D.

Ce soir, à l'hôtel Corinthia, on accueille Elie, un ouvrier de Calais inscrit au programme implants capillaires, et Micheline, de Liège, candidat à liposuccion. On trinque au gin : »Adieu à jamais corps disgracieux. «Angéla, institutrice à Belfast, a déjà la sensation d'être une autre femme sans toute cette graisse .Et sa fille de 18 ans la vénère depuis qu'elle lui a offert une poitrine de star. Nathalie, une jolie brune d'Evry, va bientôt retrouver ses quatre enfants avec un ventre plat. « Tout va bien se passer, rassures les anciennes. Dans quelques jours, à vous les souks ! »

Mais soudain, Micheline doute, Elle s'effondre dans son couscous : « J'ai peur » .

La Belge rêve depuis longtemps de pouvoir s'habiller autrement qu'en 46. Elle a fait l'animation le dimanche à l'hyper du coin pour payer sa lipo. Mais elle ne sait rien de l'opération de chirurgie esthétique qui l'attend demain, ni de l'homme qui va la réaliser. Elle a simplement vu sur Internet qu'il avait des diplômes »tout autour du monde ». Comme les autres, elle fait confiance, « les docteurs ne racontent pas des salades. » La plus part des chirurgiens qui collaborent avec les voyagistes ont été formés quelques années en France. Ils ont souvent fait les petites mains à l'hôpital ou dans les usines à silicone parisienne est fille de la médecine française, explique l'un d'entre eux. On est aussi bons. On n'a pas le droit à l'erreur, imaginez, au moindre incident, on nous attend au tournant... »

De l'autre côté de la Méditerranée, le monde de la chirurgie plastique commence effectivement à s'agiter. La présence de l'Arches (Association des Réussites et des Ratages de la chirurgie esthétique) a déjà fait le voyage jusqu'à Tunis. Pour l'instant, aucun accident grave n'a pas été rapporté, à part de cas d'une patiente revenu avec une infection ? le syndicat de la chirurgie plastique,reconstructrice et esthétique aussi est en alerte : « Dans ce système, toutes les règles élémentaires d'éthique sont bafouées, prévient son président, Alain Fogli. Il n'y pas de consultation préparatoire, pas de délai de réflexion et, plus grave encore, pas de suivi. Sans parler de l'absence totale de recours juridiques en cas de problème. Est-ce qu'on a vocation à rattraper les erreurs de nos confrères tunisiens ? » Les confrères eux, sont sereins : « Notre meilleure pub, c'est le bouche-à-oreille ».

Déjà, les premières opérées envoient leurs amies, leurs voisins, leurs collègues. Les copines de gym de Denise sont prêtes à décommander leur lifting en France. Patricia a glissé dans sa valise les photos des fesses de sa sœur. Elie, le Calaisien,espère bien expédier à Tunis ses quatre frères, chauves comme lui depuis l'age de 20 ans. « Quand on pense qu'en France un homme sur trois a des problèmes de calvitie... », se réjouit Houssem Ben Azouz, directeur de cosmetica Travel, l'autre agence de voyage du marché. Lui qui vendait des randonnées va proposer aux touristes des opérations de la myopie et des soins dentaires ... La Tunisie réalise que la santé est un bon business. Bientôt, peut-être, il n'y aura plus de chômage chez les médecins tunisiens. Bientôt, peut-être, les chirurgiens d'ici opéreront les artères des Anglais ?

Il paraîtrait que les assureurs britanniques sont intéressés.

Mais pour l'instant ce sont les cuisses et les seins des Occidentales qu'il faut remodeler. La clinique Alissa, i'une des dizaines de cliniques du pays qui se sont lancées dans l'esthétique, a réservé une aile pour les patients étrangers. L'immeuble est moderne, les chambres propres et spacieuses. Comme tout le personnel, le docteur parle français impeccable. Il est lessivé, mais vraiment heureux. « On démocratise la chirurgie. Rendez-vous compte, une dame m'a dit : « Tu m'as fait mieux que ma mère ! » Entre deux blocs, l'homme, frêle dans son pyjama bleu, rend visite à sa plus jeune patiente. Mathilde a débarqué de paris la veille. Elle a 16 ans, ses rondeurs l'empêchent de vivre, elle ne veut même plus aller au lycée. C'est sa mère qui parle. La petite n'a jamais voulu voir de psy. La seule solution, c'était la Tunisie. « Maintenant, Mathilde : régime ! », rappelle le chirurgien. Il lui montre un bidon de purée orangée, les quatre litres de graisse qu'il a aspirés dans ses cuises. L'adolescente baisse la tête, livide : « Merci. Ca va changer la vie . »

Avant elle, d'autres l'ont cru. La famille s'était cotisée à Noël pour offrir à Sandrine la liposuccion de ses rêves. Gommer en fin ce ventre ravagé par trois grossesses . Aujourd'hui, elle n'ose plus se regarder dans un miroir : « On m'a aspirée seulement au-dessus du pubis, si bien que j'ai une bouée de grossesse, je suis abjecte. »

Certaines se plaignent de prothèses mammaires placées trop hautes ou trop basses. Marie-Pierre, viticultrice à Avignon, s'est retrouvée avec un sein plus petit que l'autre. « Madame, j'ai respecté l'asymétrie naturelle de votre poitrine... », a osé le chirurgien avant d'admettre qu'il fallait réduire. Cette fois, Marie-Pierre a un peu hésité à reprendre l'avion : « J'avais peur, mais j'ai l'âme kamikaze. Finalement, là-bas, c'est comme ici. Au petit bonheur la chance... »Et puis, à ce prix-là, en Tunisie, on vous réopère aussi gratuitement : billet d'avion, hôtel et prothèse. All inclusive.

SOPHIE DES DESERTS

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